Sommaire

1 - La création du canal

2 - La naissance de l'oeuvre: "L'Oeuvre de Salon"

3 - L'écu

4 - Les eaux facultataires

5 - La branche d'Arles et l'Oeuvre d'Arles

6 - L'Oeuvre Générale

7 - La distribution des eaux aux XVIIe et XVIIIe siècles

8 - Les perturbations de la Révolution

9 - Les difficultés du début du XIXe siècle

10 - La poursuite des conflits

11 - La mise en place des structures actuelles et les transformations apportées par E.D.F.

 

 

1 - La création du canal


 

            C’est le 17 Août 1554 qu’Adam de Craponne, ingénieur du Roi Henri II, obtint des présidents et maîtres rationnaux de la chambre des comptes et archives du Roi en Provence, “permission et licence de dériver les eaux de la Durance à son profit et pour en jouir, user et disposer par les terroirs de la Roque, Lamanon, Salon et autres lieux où bon lui semblera et où lesdites eaux pourront être conduites.”

Adam-de-Craponne.jpg

            Il commença immédiatement l’exécution de son canal, réalisant tout d’abord un fossé, sorte de pré-canal, dont la prise était établie un peu plus haut que le rocher de Pié-Berard, non loin de Gontard. Ce canal fut construit initialement depuis Sylvacane jusqu’à Salon, par la Roque, Charleval, Mallemort, Alliens, Lamanon. Il pénétrait dans la ville de Salon par la descente de la Baume, au quartier du Paradou et de là les eaux arrivaient aux remparts vers la porte de Pélissanne puis se jetaient dans “les garias”, fossé qui entourait la vieille ville.

 

            Dès 1556, ce “canalet” fut agrandi et l’eau y fut mise pour la première fois le 13 mai 1557. Quelques travaux de parachèvement durent encore être exécutés, qui firent que l’eau ne fut permanente jusqu’à Salon qu’à partir du 30 avril 1559. Par la suite, Adam de Craponne continua son canal, d’une part sur Pélissanne et Lançon, d’autre part, depuis Salon jusqu’à Grans et de là à Istres. Le tronçon Grans-Istres n’existe plus de nos jours.

Une autre branche se détachait à Lamanon pour le terroir d’Eyguières. Par ailleurs, Adam de Craponne fit, le 7 juillet 1561, une proposition aux consuls d’Arles, visant à l’amenée des eaux de Durance dans cette ville.

 

            L’édification du canal fut une oeuvre d’initiative privée, à laquelle participèrent toutes les classes de la communauté de Salon. Elle fut le résultat d’un effort collectif, suscité et dirigé par un homme de génie. La famille de Craponne, ses amis de la noblesse salonaise et, en particulier, Nostradamus, furent les grands bailleurs de fonds de l’entreprise, avec les communautés des villages desservis, le peuple des travailleurs de la terre fournit les journées de prestations nécessaires dans chaque village. Ni le Roi, ni la Province n’intervinrent pécunièrement.

 

 

2 - La naissance de l'oeuvre: "L'Oeuvre de Salon"

 

 

 

Adam de Craponne sacrifia malheureusement toutes ses ressources à l’achèvement de l’ouvrage. Il dut recourir à l’emprunt et consentir de nombreuses concessions anticipées, à bas prix ou gratuites, pour obtenir la cession des terrains nécessaires à l’achèvement du canal.

Ne pouvant fournir de l’eau à suffisance comme il s’y était engagé, il se résigna à abandonner son oeuvre aux principaux usagers, souvent ses créanciers, qui à la suite des concessions qu’ils avaient acquises avaient construit des engins et usines sur les divers points du canal et, plus rarement, établi des arrosages.

 

            Les conditions de cette cession furent réglées par une transaction du 20 octobre 1571, notaire Catrebards à Aix en Provence, qui fixe en même temps les bases de la constitution d’une “communion” ou “société” des divers usages. Les parties intervenantes furent:

le conseiller Thomassin, propriétaire des arrosages de Pélissanne (30 écus) et du moulin et arrosages de Lançon (200 écus);

le receveur Crapassi-Cazeneuve;

Sieur de Châteauneuf, Sieur Isnard, sieur Paul, seigneur Suffren, propriétaires des 4 moulins de Salon (400 écus),

Les hoirs du capitaine Tripoly, propriétaires des arrosages du Gesc à Salon (50 écus);

Frédéric de Craponne, propriétaire du moulin et des arrosages d’Eyguières (200 écus);

Antoine de Cadenet, propriétaire du moulin (Vieux Moulin d’Alliens) et des arrosages de Mallemort (80 écus);

Et Adam de Craponne, par le ministère de Maître Etienne Dominicy son procureur fondé. Par cet acte, Adam de Craponne cédait et transportait à la nouvelle société, dans laquelle il n’entrait pas, la plus grande partie de ses droits sur le canal et ses eaux.

Ces droits sont ceux énumérés dans la transaction. Parmi ceux-ci les arrosages du quartier des Viougues, à Salon, revenaient en propre à la “communion”.

 

            Cependant, Adam de Craponne conservait, francs de toute cotisation aux charges de la société qui se formait, certains autres droits (tels ceux de ses canaux venant de Grans et d’Eyguières, de son moulin et arrosages d’Istres, des arrosages de Grans, St Chamas, et Miramas). Il se réservait par ailleurs le droit d’établir de nouveaux moulins et arrosages en dehors de ceux spécifiés dans la transaction. Il réservait aussi, pour lui et les siens, la faculté d’agrandir la prise et le grand canal, pour amener les eaux partout où il n’en avait cédé le droit, en prenant à sa charge les frais d’agrandissement et en contribuant ensuite à l’entretien “au prorata de l’eau que mettra d’avantage au dit fossé, rentes et revenus qu’il fera d’icelles” (cette clause impliquait qu’il deviendrait alors membre de la société).

 

            Les contractants devenaient actionnaires de la société, chacun recevait une quantité d’eau déterminée, avec un ordre de préférence en cas de pénurie. Ils avaient dans l’association une influence proportionnelle aux rentes et revenus que chacun pouvait retirer de la quantité d’eau qui lui était attribuée. La contribution aux charges, invariable, était fixée relativement à ces revenus. L’unité de cotisation, ou part, définie fut l’écu. Ainsi, 960 écus furent inégalement répartis entre les divers contractants.

            La transaction faisait obligation à la nouvelle société d’entretenir la prise, le canal et certains ouvrages, de maintenir l’eau dans le canal (10 moulans environ) et de desservir les concessions précédemment consenties par Adam de Craponne en faveur d’autres personnes que celles qui intervenaient dans la transaction (celle-ci devinrent les “facultataires”).

 

 

3 - L'écu

      

             L’écu signifiait “part”. Il se rattache au volume d’eau. Un moulan d’eau était cotisé par 100 écus, qui donnaient droit à 1 voix dans les délibérations de l’oeuvre. Un moulan (250 l/s) est la quantité d’eau qui peut sortir à niveau mort par une ouverture de 9 pouces de hauteur sur 36 pouces de largeur.

            La valeur de l’écu à l’origine était la même pour les moulins et les arrosages. Une délibération de l’oeuvre en 1802 modifia l’égalité et fixa à 6 la valeur de l’écu d’usine et à 10 celle de l’écu d’arrosage. Le montant des écus pour les actionnaires restait invariable mais leur taux variait chaque année. Pour les facultataires les montant des écus, tout comme leur taux, était variable.

 

 

  Suite...

 

 

Sources:

- Ministère de l'Agriculture, D.d. (1975). Etude Générale de Modernisation des Irrigations de la Basse Durance - Canaux de Craponne, Organisation et Ouvrages, Mémoire Descriptif - Historique et Situation Juridique.

- BALLAND,P., HUET,P., LAFONT,E., LETEURTROIS,J-P., & PIERRON,P. (2002). Rapport sur la Durance – Propositions de simplification et de modernisation du dispositif d'intervention de l'Etat sur la gestion des eaux et du lit de la durance – Contribution à un Plan Durance. Ministères de l'Ecologie et du Développement Durable, de l'Industrie et de l'Agriculture, de l'Alimentation, de a Pêche et des Affaires Rurales, de l'Equipement, du Transport, du Logement, du Tourisme et de la Mer.

- DDAF13, Services Hydrauliques (1976). Les Groupements d'hydraulique Agricole des Bouches du Rhône - E: Irrigations de Craponne.

 

Tag(s) : #Histoire - description